Favelas
Un urbanisme pour la ville informalle

 

 
 

« Une ville nous arrive par les yeux et par les pieds .»
Walter Benjamin


A l’heure actuelle, si la télématique maximise le potentiel de dispersion géographique, le processus de globalisation économique impose une logique de concentration qui a besoin de lieux dotés d’énormes infrastructures, de main d’oeuvre et d’édifications spécifiques. Ce paradoxe, caracteristique des villes contemporaines, demande de nouvelles capacités organisationnelles, de nouvelles technologies et de nouveaux secteurs de croissance. En Amérique Latine ce phénomène semble engendrer aussi bien la naissance de nouvelles centralités que la croissance de la marginalisation sociale. Sa manifestation la plus évidente est la production d’une ville divisée entre ¨le secteur formel¨ composé d’un centre, de sub-centres et de quartiers ; et ¨le secteur informel¨ formé par les favelas et périphéries, scission qui détermine un fort trauma urbain. D’apres Freud les questions traumatiques amenent à la perte primordiale du sujet en relation du champs de l’autre.

Ceci est en relation avec l’excès inadmissible qui est le réel, et qui va se manifester sous forme de symptômes, d’angoisses et de peurs. Mais il existe des moments historiques précis qui se prêtent à la production de cet inadmissible. C’est pour cette raison qu’il faut contrôler, grâce à des interventions urbaines consistentes, des projets qui permettent la connexion et qui rendent possible l’articulation des différences quand elles deviennent intolérables. Quand un tel vide est constaté, le trauma inadmissible qui est la ¨ville divisée¨, surgit l’exigence de restituer les connexions à partir d’une structuration capable d’articuler le stratégique, la question urbaine considérée à long terme, avec des interventions tactiques, ponctuelles, spécifiques, capables de répondre aux plus grandes urgences.

Aujourd´hui, la diversité de processus en cours est liée à la dispersion territoriale des personnes, aux pratiques économiques et culturelles, et à son symptôme urbain qui est l’augmentation du ¨secteur informel¨, se traduisant par l’occupation de terres publiques ou en litige, des espaces comme les trottoirs, les places et les rues et les espaces résiduels, par toute sorte de « clandestins ».

Et c’est dans ce sens que s’orientent les demandes d’interventions restructurantes dans les grandes villes Latino Américaines. Des organismes hautement complexes, où s’interceptent des logiques les plus variées, exigent un concept de planification de développement étroitement lié au projet urbain et aux politiques de logement. Une telle planification doit être capable d’articuler les questions physiques d’infrastructure, du paysage et de l’environnement, avec les questions sociales, qui abordent les thèmes culturels, économiques, existentiels, et celui de la sécurité des citoyens. Tout en considerant les aspects écologiques dans ces trois dimensions, mentale, sociale, et environnementale, en accord avec Félix Guattari.

Le problème de l’articulation / hybridation du formel et de l´informel en Amérique Latine
La politique publique d’intégration dans le contexte actuel doit s’inscrire dans le cadre des politiques urbaines. Elles doivent inclure le combat contre l’exclusion, et l’amélioration de la qualité de vie de la population, comme ses composantes fondamentales. Cette approche exige de considérer la structure urbaine comme un tout, et le problème des connexions entre les parties « formelles » et « informelles », comme une question centrale. De manière à rendre cruciales les politiques publiques d’accès à «l´ urbanité» pour les plus démunis.

Dans les villes Latino Américaines, le pourcentage de la « ville informelle », dans certains cas, est supérieur à celui de la ville formelle. A Caracas, 60% de la ville est informelle. A Lima c’est 70% de l’extension de la ville qui est informelle. Et dans la plupart des autres villes, le pourcentage varie entre 30% et 50 % . C’est le cas des villes du Méxique et du Brésil, les deux plus grands pays du sous continent.

Une autre composante importante qui doit être prise en compte par les politiques publiques en relation à la question urbaine, où la politique du logement doit s’inscrire, est la contribution qu’elles peuvent apporter à l’activation de la participation des citoyens. Mais pour être effectives, il est indispensable de promouvoir l’intégration avec des programmes qui impulsent des initiatives capables de générer du travail et des ressources. Les politiques d’urbanisation et de construction de logements pour tous les segments de la société, constituent les mesures les plus directes et efficaces pour y arriver.

Pourtant, une politique de integration urbaine bien structurée devra nécessairement prendre en compte tant les aspects quantitatifs des coûts et dimensionnements, que les aspects qualitatifs, dans lesquels s’inscrivent la création de cadres favorables à l’intégration et la participation sociale, dotés de services et d’équipements les plus variés et avec un haut degré d’élaboration esthétique.

Ainsi, il ne s’agit pas seulement de construire un certain nombre de logements pour résoudre le déficit d’habitation, mais de le faire à partir d’une conception de la ville, du lieu, où le multiple et le divers permettent et valorisent l’existence de l’espaces pour l’individu. Où il soit possible de se sentir partie intégrante du quartier, intégrante de la ville, et en même temps, pouvoir trouver son petit coin, sa propre échelle, son espace de recueillement, être capable de se déconnecter ou se connecter, dans la mesure des besoins et des désirs.

La politique urbaine ne doit pas être considérée à partir d’un point de vue purement économique, mais simultanément comme un moyen de construction de l’environnement physique et du cadre favorable à la vie en société, loin des actions opportunistes qui ne cherchent qu’à offrir un abris, et résoudre des besoins « minimums » ou « basics ».

L’enseignement de l’urbanisme informel.
Aujourd’hui, les dénommées sciences sociales concentrent leur regard sur les villes car elles définissent le profil des nouveaux acteurs politiques où la question de l’habitat est un des facteurs principaux. Le défit de gouverner des « villes globales » est en relation directe avec les dangers qui guettent leurs habitants. C’est pour cette raison que la compréhension des processus socio-économico-culturels se fait de plus en plus dans les recherches menées sur la ville réelle.

L’économie informelle est en train de devenir une des marques du nouveau millenaire dans tous les continents. Alors qu’on dispose de moyens technologiques hautement sophistiqués pour manipuler l’information et l’image, on n’arrive toujours pas à garantir l’apport d ‘eau, l’infrastructure, la nourriture où du travail à une grande partie de la population mondiale. Cette situation, résulte de l’application de modèles économiques de « développement » qui n’ont pas comme but l’amélioration du bien être social (comme par exemple garantir l’accès au logement pour les groupes socialement fragiles, avec qui on ne peut pas obtenir de grands bénéfices).

Le processus de « l’urbanisation informelle » dans le contexte dans lequel on l’aborde, a finit par constituer l’élément dominant des productions de villes dans les pays Latino Américains. La magnitude de cette forme « d‘urbanisme » est devenue la norme, et non plus l’exception. Pour pouvoir re-diriger ce processus, sont nécessaires, aussi bien des formes d’approche projectuelles, que des nouveaux concepts et méthodologies, tout comme des nouvelles formes de gestion et d’articulation public-privé-communauté. Ce phénomène est caractérisé par une indiscriminée occupation des sols, d’inadéquates conditions d’accessibilité, de l‘inexistance de titres de propriété, du manque d’équipements et services, et de divers degrés de précarité des logements. Il existe néanmoins un haut niveau de participation de la population.

En même temps, l’informalité ne se réfère pas uniquement à l’autoconstruction ; elle inclut presque tout le temps la viabilite de divers espaces pour des usages communautaires et infrastructures fragmentaires.

Mais ce fait ne concerne pas seulement le comportement des classes populaires, comme le démontre le cas du nouveau quartier de Santa Fe à México, et Barra da Tijuca à Rio de Janeiro.

Certaines caractéristiques principales de la manière de ‘faire la ville’ dans l’informalité sont :

§ La dimension sociale et politique : penser l’urbain à travers la logique de la ville informelle implique de pouvoir réaliser une approximation capable d’aborder le réel, le quotidien et le construit selon des tactiques et des stratégies flexibles dans le temps, travaillant dans le court et long terme simultanement, répondant aux principales urgences, avec une vision d’articulation et une stratégie des processus, cherchant leur confluence selon une séquence programmée d’actions et projets complémentaires de divers types et échelles.

§ La combinaison de stratégies : une ¨non habituelle¨ combinaison de stratégies à long terme devrait normalement être la manière d’optimiser la relation entre les besoins et les possibilités pour les affronter. La construction d’une structure de base pour vivre ou d’une cantine populaire, par exemple, peuvent être faits en deux jours, et dans d’autres cas la transition du refuge au logement finit, peut prendre des décennies. Ceci oblige à repenser la compréhension de l’urbanité dans le sens traditionnel du terme, pointant sur une urbanité définie par l’accumulation et la densité de processus socio-spatiaux, intégrants quelques règles minimales de orientation et ordonnancement.

§ Les processus de participation : une intense intéraction entre les actions humaines et les conditions spatiales est constatée dans la production de la ville informelle, de la façon de se procurer les services et infrastructure, jusqu’à l’utilisation de la « rue » comme extension de l’espace privé. Les stratégies pour configurer des espaces habitables comprennent une grande participation de la population concernée et une complexe interaction entre les aspects physiques et sociaux.

§ Les espaces non hiérarchisés : l’espace résiduel des processus d’occupation informelle est toujours en reconfiguration : subdivision des sols, usages, infrastructure, et relation public-privé. Il présente un grand niveau d’adaptabilité. Les formes spécifiques d’occupation de parcelles et approvisionnement de services et d’infrastructure, substituent les traditionnelles hiérarchies spatiales qui agissent dans la ville formelle.

§ La reconfiguration des centralités : a partir de l' introduction de nouveaux atracteurs de vie urbaine.

§ Gérer le provisoire, mettan en jeu une trame vert progressive.

Objectifs des projets de structurations urbaines
L’essentiel est de démocratiser pour tous les citoyens la jouissance de l’urbanité. Combattre la ville divisée, le « déficit de ville » dans les bastions de la pauvreté et ailleur. Il est nécessaire de promouvoir la connection de la structure urbaine comme un tout, ne pas déloger l’habitant, pour ne pas rompre les liens sociaux existants, respecter l’histoire de la constitution de chaque lieu spécifique et les investissements faits par chaque habitant tout comme leurs efforts personnels. A partir de là, articuler les aspects physiques, culturels et écologiques tout comme les questions de sécurité de la population, garantissant une nouvelle condition de citoyenneté pour cette énorme population, cherchant à diluer l’opposition formel-informel moyennant l’articulation des différences, générant des points de passage, lieu de transitions urbaines.

La méthode d’analyse utilisée, implique de concevoir l’analyse comme projet. Elle entoure une suggestion de méthode qui implique de reflechir sur l’identité, cherchant à reveler les differents caracteres qui contient, et sugère des pistes d’intervention spatiale. Elle implique une appropiation des concepts de Jacques Derrida appliqués à la structuration de l’informalité, realisant une approche genealogique du lieu. Il s’agit de l’étude de l’origine de la configuration et de la re elaboration de concepts pour penser la complexité des variables en jeux. Cette methode implique connaître pour agir et pas seulement pour connaitre; reveler le lieu, son potentiel et sa relation avec la ville.

Ainsi les travaux comprennent de trois aspects principaux :

a_ L´Écoute des demandes : c´est une question centrale qui est en relation tantôt avec les demandes individuelles, qu´avec les demandes collectives. D´aprés la psychanalise, la question n´est pas répondre mais interpréter (les demandes) dans une configuration consistente qui requiert l´execution d´un noeud entre l´etique (ce qu´il doit étre fait), l´esthétique (le dfi du nouveau) et le politique (la relation toujours complexe avec l´strctures du pouvoir).
La psychanalise nous alerte sur la question étique qund, face à tout type de conditionnements (économiques, sociaux, culturels, politiques, etc) « l´acte projectuel » implique em une position (étique) qui pourrait être synthée de la manière suivante : « il est nécesaire de faire ce qu´il doit être fait ». Mais ce « devoir » n´est pas de l´ordre de la morale ou de la loi. C´est un devoir dans lequel un « au-delá de la demande « est mis en jeu en permanence. C´est pour cette raison qu´il ne se traite pas d´agreder, comme une forme de séduction ou d´harmonie, en tout cas, ce n´est pas ici la question fondamentale.
On pourrait dire que l´étique d´un architecte est intimement avec relationnée avec l´intangible qui se dévoile des articulations qui realise entre le projet (dessin), et les intentions pour lesquelles focalise (dessein).
De cette manière, il est nècessaire de savoir que la question de « l´interprétation » des demandes implique d´écouter au delá des déclarations, en faisant une diffèrence entre demandes latentes et demandes manifetes.

b_ Elaboration du schéma de lecture de la structure du lieu : cette lecture commence par la reconnaissance du térritoire dans ces contraintes et ses potentiels. Elle inclut l’écoute des demandes des habitants et le questionnement d’ interlocuteurs alentours, ainsi que la recherche de la zone d’action. C’est une lecture multidimensionnelle qui enregistre le niveau d’articulation interne et les centralités manifestées ou latentes, considérant les connexions avec l’environnement et les conditions d’accessibilité. Cette lecture enregistre en outre les vides internes et dans l´environnement d’intérêt projectuel, en plus du degré d’organisation de la communauté, des caractéristiques de la main d’oeuvre et des conditions du paysage et de l’environnement du lieu.

c_ Formulation du schéma urbain : établit la base de la cohérence générale qui articule le physique, le social, l’écologique et les questions de sécurité, répondant à la viabilité des propositions (investissements 3500 dollars par famille). Le schéma urbain précise les actions juridiques prévues, définit la reformulation du système viaire d’accès et de circulation, et établit les contrôles d’expansion. Il articule l’intra municipal (articulation intra secretarias) avec les instances étatiques et fédérales, et renforce les centralités existantes en créant de nouveaux noeuds d’irradiation. Dans cette étape sont signalés aussi les accords pour la viabilité partiale des interventions proposées avec des acteurs publics et privés.

CIDADE DE DEUS - Cité de Dieu

Un commentaire à propos du film qui a recu quatre nominations aux oscars cette année et dont le protagoniste principal est le propre lieu.

Ce film a eu une double répercution. D’un côté, il pointe le grave problème de l’exclusion sociale, particulièrement au Bresil, et par extension l’exclusion dans toute l’Amerique Latine. De l’autre côté, il a contribué de maniere significative à stigmatiser, encore plus, la population qui vit dans ce secteur de la ville de Rio de Janeiro, á tel point que les habitants de Cidade De Deus, n’ont aucune sympathie à l’égard du film.

Au contraire, ils l’accusent de contribuer au renforcement d’une image négative du lieu, car une fois la favela visitée, on peut se rend compte qu’elle ne correspond pas du tout á l’aura que le film a fait d’elle. Selon le film, CDD est un lieu où habitent des personnes sans honneur, sans projets, sans avenir, et qui constitue un cadre de désespoir. Mais comme on le verra, la réalite est diferente. Les habitants de Cidade de Deus, sont hautement politisés et organisés ( 17 entités composent le Comité Communautaire) et fonctionnent avec l’appui de nombreuses organisations et institutions, publiques et privées.

L’idee d’une île amputée du reste de la ville, par consequent, n’est pas vraie.

Les interactions avec des Institutions de tout type sont au contraire une marque distinctive qui a créé des conditions excellentes pour la formulation de nombreux projets d'intégration culturelle et économique. Et maintenant, avec le support des architectes, CDD organise sa traduction dans un projet d'articulation urbaine, sociale et environnementale, avec l'objectif non seulement de structuration interne mais aussi de connexion avec le contexte, et principalement un secteur de la ville de Rio en situation d’énorme croissance et transformation : la Barra de Tijuca.
De même qu’a 1.5 km de Cidade de Deus, est en cours de construction la Ville Panaméricaine pour les jeux Olympiques de 2007.
Un autre "voisin" très important est le très puissant SESC (Service Social du Commerce) dont les énormes installations sont limitrofes de cette grande “favela”. Mais il existe d'autres partenaires potentiels, que la formulation du Projet d'Articulation aide à diriger. C'est pourquoi le simplisme et le fatalisme dangereux que le film promeut dans sa description du lieu, oublit tout ce réseau actif d'acteurs réels. Un élément significatif à considérer par rapport à Cidade de Deus est le fait de ne pas être originellement une favela mais un "ensemble habitationnel", euphémisme utilisé pour désigner des groupements de constructions sans aucune qualité, faits pour les couches de plus basses ressources de la société et produits par des Agences Gouvernementales dans tout le pays, avec une vision immediatiste des solutions proposées.

Cidade de Deus, avec aujourd'hui environ 65.000 habitants, était à l'origine (années 60) un ensemble de logements pour les résidants des favelas localisées dans les secteurs nobles de Rio (comme la "Lagoa") et qui ont été expulsés vers la périphérie de la ville, sans service ni équipement urbain ne formant ainsi aucun type d’urbanité. Tout cela avec l’argument d’"hygieniser" et "gagner" les espaces occupés par la favela, pour la ville formelle, où, sauf exception, ils ont finalement été livrés à la spéculation immobilière.

Mais le fait que Cidade de Deus compte sur une forte et active organisation communautaire, avec de nombreuses écoles (seulement d'enseignement primaire, parce qu'ils n'ont pas d'enseignement secondaire), une clinique, une ecole de Samba, etc., lui confère un potentiel que le projet developpé par mon agence interprète et rend disponible comme instrument dont le Comité Communautaire manquait.

Le projet d'articulation Urbaine et Sociale, localise spatialement les événements, reconfigure les centralités et définit des programmes nouveaux à partir du dialogue avec la Communauté à travers l'écoute des demandes, en menant en considération la relation coût- bénéfices. Ceci facilite les négociations tant avec le pouvoir public qu'avec les secteurs d’initiative privée et de nombreuses organisations et institutions qui agissent sur la localité et l'environnement. Le projet nous a été sollicité par l'intermédiaire de la Caixa Économique Fédérale, qui est une institution agissant au niveau local et au niveau national, en rapport avec les programmes habitationnels. Le projet part de la lecture de la structure du lieu, de l'interprétation des demandes, de l'incorporation d’informations, et des projets existants élaborés par les membres du Comité et fait son intégration avec les concepts disciplinaires relatifs à l’urbain, architectonique, paysagistique et environnemental.

Le projet propose de renforcer les centralités existantes, la création de nouveaux foyers de vie associative et l'introduction d'un nouveau germe de vie urbaine par la conception de trois nouveaux ilots résidentiels, avec services commerce, pour relocaliser 600 familles installées dans un secteur marécageux dans des conditions très précaires. Ces nouveaux ilots ont été conçus avec un concept de génétique urbaine dont sont porteuses chacune des unités résidentielles expansibles projetées. Il se base sur un noyau initial de 32m2, conçu architecturallement et urbainement, où l'utilisateur peut effectuer des extensions en accord avec ses besoins et sa capacité économique, a long terme.

Cet aspect du projet est significatif car il permet d'articuler des conditions urbano- architecturales d'intérêt général à l’echelle de la ville (façade urbaine inclue) avec la participation des habitants sans compromettre la qualité de l'espace public .

Les agences gouvernementales ont une responsabilité spéciale et spécifique dans le champ d'action des projets urbains et des programmes habitationnels, cherchant à creer les conditions ideales pour des projets capables de changer le paradigme en vigueur de caractère principalement quantitatif, pour un autre qui considère la qualité de vie et durabilité des projets, en promouvant une nouvelle relation Homme / Environnement.
Il est nécessaire de dépasser la politique "clienteliste" qui implique une médiation en cherchant à construire des réseaux d'accès, ce qui signifie pouvoir choisir plusieurs chemins. La culture de réseaux présuppose une intégration horizontale en opposition à la pyramide.

Tout ceci a besoin d’une redéfinition des relations entre éthique (comprise comme "faire ce qu’il doit être fait"), esthétique (ce qui concerne la finition de l'écriture architecturale) et politique (les relations toujours complexes avec les structures du pouvoir) ; dès la considération simultanée de trois écologies : mentale (dépollution des concepts pour pouvoir penser), sociale (révision de l’ensemble des relations sociales, du "socius"), et environnementale (tout ce qui est relatif à la durabilité des interventions).


L’architecte dans un contexte d’ « incertitudes complexes »

Pourquoi l‘architecte urbaniste offre t-il un élément pour l’articulation politique du territoire, et dans ce sens contribue t-il au combat contre le trauma urbain ?
Parce qu’il tient le rôle d’un « cartograhe » des conflits et « identificateur » des manques. Néanmoins l’architecte est concerné par la question du territoire.

Ainsi la question qui se formule est : comment focaliser le territoire ? Comment réaliser l’approche projectuelle ? Comment l’aborder à partir d’une autre perspective ?
Aujourd’hui, le lieu et la demande sont beaucoup plus « explosifs ». Il s’agit de la carte d’une ville qui a besoin d’acteurs publics et privés. Dans ce sens, la solution repos sans doute sur une approche transdisciplinaire des différents facteurs qui interviennent, avec une coordination éfficace des différentes sphères du pouvoir public impliquées, avec une convergence de forces capables de participer et d‘aider à rendre viable les parties des programmes, avec une mobilisation sociale dans laquelle le rôle des medias est fondamental. Car il est nécessaire de promouvoir un débat ouvert qui cherche à éliminer les préconcepts et les positions à priori dans l’approche de chaque discipline et de chaque aspect des problèmes, réalisant une écologie mentale.

Cartes de survie

Quel est la carte de l'architecte? Quelles sont ses géographies? Comment une carte est obligée de se plier et déplier?

L'architecte ne doit pas avoir peur de la guerre. Même parce que la ville bourgeoise comporte des dispositifs d'auto isolement, des quartiers et lotissements fermés, des rues privées, des dispositifs militaires et symboliques de ségrégation qui corroborent la métaphore de la guerre. Une grande partie de cette problématique, aujourd’hui, explosive, a été instaurée en Amérique Latine par les puissants dès l'époque de la colonisation. Il s'agit de bio-politique ( c’est à dire, la non soumission aux logiques dominantes) contre bio-pouvoir - le pouvoir des réseaux, les institutions n’assurant plus le contrôle à cause de l´amplitude des problèmes.
Ainsi, dans le drame urbain contemporain, l’architecte est un corps exposé au risque et doit apprendre a se dédoubler et a redoubler, a tracer la carte du risque, a jouer de l’intérieur vers l’extérieur, et formuler des projets de structuration qui considèrent la logique de la ville comme un tout, articulé avec des interventions ponctuelles, concrètes et immédiates. Ce qui implique de capter la structure du trauma dans la ville.

Le déficit du logement et l’augmentation de la tension sociale dans les principales métropoles.

Du point de vue urbain-social, le déficit de logements est un des facteur traumatiques qui a contribué fortement à l’augmentation de la tension sociale dans les grandes métropoles, non seulement au Brésil, mais dans toute l’Amérique Latine en général. Tandis que le centre de la ville de Sao Paulo grandi au rythme de 1% par an, la périphérie et ses « nouvelles frontières » urbaines grandissent au rythme de 12% par un. A Rio de Janeiro, le centre et les principales parties de la ville formelle ont grandi de moins de 10% entre 1980 et 2000, pendant que la population des favelas est passée de 720 000 habitants à 1,100 million dans la même période. On sait que la situation de l’informalité de l’habitat est grave et croissante dans toutes les régions métropolitaines, créant un scénario d’un risque social élevé.

Rio de janeiro est un exemple de cette situation.

Additionné au manque d’accès aux services d’ assainissement de base, de politiques éfficaces de création d’emploi et de resources, d’espaces de qualité propices à la convivialité et d’une politique consistante de sécurité, le déficit du logement est directement lié à la question de la violence urbaine, problèmatique majeure dans les principales métropoles, où les différentes couches sociales cohabitent très proches les unes des autres, et dans le cas de Rio litteralement superposées.

Aujourd’hui, le déficit de logements dans le pays atteind 2,192millions d’unités, sans prendre en compte les 1,355 millions de domiciles enregistrés dans les favelas, qui représentent 33% de ce déficit en thermes de besoin de nouveaux logements et 82% en thermes de demandes d’urbanisation.
C’est ceci qui met en évidence clairement la partition du tissu physique-social.
Au total, le déficit de logements officiel du Brésil atteind le chiffre très préoccupant de 6.6 millions de logements. Reliée directement à cette question il existe une distorsion perverse des lignes de financement proposées par les fonds du FGTS (Fondo de garantia del trabajador) qui sont, paradoxalement, dirigées vers les couches aisées de la population.

Cependant, l’actuelle situation politique, économique et sociale est apte à repenser l’Amérique Latine et découvrir comment nos pays peuvent affirmer leurs systèmes démocratiques et engendrer des processus de croissance durables. Et ceci est en relation avec le renforcement institutionnel, une grande fragilité dans tout le continent, et avec des stratégies de développement productif, qui rendent possible l’amélioration de la distribution des ressources dans la région.

On sait que la question du logement est un des trois problèmes urbains qui demande des reponses au niveau national : avec l’environnement et le transport. Mais le manque de logements, se trouve, sans aucun doute, au centre de la question urbaine en raison de l’exclusions qu’elle implique pour une grande partie de la population, dans un pays où le marché immobilier formel occupe à peine 20% des logements produits dans le pays.

L’urbanisation dans les principales métropoles aussi bien du Brésil que de l’Amérique Latine se caractérise par l’affaiblissement du centre et de quelques quartiers traditionnels en faveur d’une rapide expansion des périphéries et nouvelles frontières urbaines.
Pour cela une politique du logement consistante doit être focalisée de maniére intégrée et avec une perspective multidisciplinaire capable d’articuler le macro, sous la forme de développement urbain social stratégique, avec le micro , c‘est à dire, des actions localisées qui répondent aux urgences majeures à partir de l’écoute des demandes, ayant pour objectif l’articulation de la ville divisée.

Le cadre aujourd’hui existant, c’est évident, a besoin d’être transformé radicalement de manière à avoir l’opportunité de modifier la situation extrêmement injuste et préoccupante dans laquelle on se trouve, où un type d’urbanisation hors contrôle détermine ce qu’on peut caractériser par « urbanisme explosif ».

Jorge Mario Jáuregui, architecte et urbaniste, lauréat du Veronica Rudge Green Prize en Urban Design par Hardvard University et lauréat du prix de recherche de la IIIème bienale Ibero Americaine d’Architecture et Urbanisme de Santiago du Chili.

Chercheur associé au laboratoire de morphologie SIC y FADU/UBA de l’Université de Buenos Aires, Argentine.
Parmi ses principales publications : Estrategias de Articulacion Urbana- Proyecto y Gestion de Asentamientos Perifericos en America Latina- Un enfoque Transdiciplinario, FADU/UBA 2002,Buenos Aires, et The favela Bairro Project, Jorge Mario Jauregui Architecs, Harvard University Graduate School of Design, Cambridge, Massachusetts, 2003.

(Traduction : Héctor Becerril, étudiant en 6ème année à l’Ecole d’Architecture de Lyon)